Vendredi 09 Septembre "Torturée"

Beaucoup de rééducation dans le programme de cette journée.

Joana a pris la relève ce matin est m'a torturé, le mot est faible, pendant deux bonnes heures.

Séance de supplice, d'autant plus que depuis 8h00 du matin je m'entrainais à faire plier mon genou. J'avais déjà pas mal souffert.

Une poche de glace sous les fesses pour que ma protubérante hanche se calme, un ballon sous les cuisses et souffre ma poule.

Après avoir longuement travaillé sans répit, mes muscles tremblaient à chacune de mes demandes comme des feuilles mortes. Je passais outre leur cris d'appels et je leur en demandais toujours plus (ma devise). Non mais, ce ne sont pas eux qui font la loi tout de même. Déjà que j'ai des genoux capricieux! 

Au bout d'une heure et demie de souffrance infligée par Joana, le kinetech à prit le relais. Je me suis donc laissée guider par la machine.

En fin de séance, elle a essayé de me remettre le bassin à peut près droit, juste en me faisant bouger légèrement. Pas de panique, ce n'était pas une manipulation, elle m'a juste montré où mon bassin se trouvait être le plus droit. 

Depuis mon hospitalisation, mes proches et moi même avions déjà bien constaté que je ne me tenais pas droite, et que je m'étais repliée à gauche.

Une fois mes hanches alignées, je lui ai demandé s'il y avait une différence de longueur entre mes deux jambes. 

Elle a mesuré, et m'a dit qu'il y avait deux centimètres de moins à gauche.

Inconsciente, je me dis que c'est à peu près bon finalement. Quand on se rappel qu'au départ, une vingtaine de centimètres faisaient la différence.

Il faudra juste des talonnettes ajoute t-elle. Gros blanc. Mes yeux ont commencé à se mouiller, mais j'ai tenu bon. Je lui ai demandé si la rééducation ne pouvait pas combler cette différence.

Mais de toute évidence, mon bassin s'est tassé dans l'accident. Et pour cela, aucune traction ne pourra rien y changer.

Comment imaginer que l'on ne sera plus jamais comme avant, moi qui n'ai jamais eu l'occasion de me préoccuper plus que ça de mon corps, même pas un simple petit régime de toute ma vie (Sauf Ducan pendant 2 jours, 6 heures et 24 minutes).

À croire que je n'ai toujours pas digéré la difformité de mes genoux cagneux, mes jambes inégales et mon bassin tout tordu.
Mon coeur s'est serré, et mes dents aussi. Comment est-ce possible que du jour au lendemain, on se réveille loin de chez soi, loin de sa petite vie trop parfaite?

Je vais devoir admettre que mon esprit souffre, il va maintenant falloir assumer le fait que je boiterai. Et que si je ne boite pas, je compenserai avec ma colonne vertébrale et que je risque de plus gros problèmes encore.
Bien sûr qu'au centre je vois de tout. Évidemment qu'il y a pire que moi.
Tout me semble irréel, je ne suis pas à ma place. Seuls mes rêves me permettent de revenir en arrière. Je suppose que c'est pour cette raison que je ne veux pas ouvrir les yeux le matin. J'ai trop peur de ne pas être à la maison...

Cette révélation m'a fait perdre un point de moral sur l'échelle de Richter, j'essaie de ne surtout pas y penser. Maintenant c'est écrit. Je vous laisse ma douleur et je m'en vais en courant.

Lorsque je suis arrivée dans ma chambre, j'ai reçu un appel de l'accueil me prévenant qu'un bouquet de fleurs avait été déposé à mon attention. J'ai donc demandé gentiment si une Aide soignante pouvait aller le récupérer pour moi.

En la voyant arriver par la fenêtre avec un magnifique bouquet de roses rouge, j'ai tout de suite pensé à mon Jean Phi. Puis j'ai hésité, je l'avais vu la veille, et il n'y avait pas de raison majeur pour m'offrir des fleurs. 

Intriguée, j'ai donc lu le petit mot associé. J'ai immédiatement reconnu son écriture, il s'agissait bien de mon Jean Phi. Comment avait-il su qu'à ce moment précis de ma journée j'avais besoin de lui?

J'ai pleuré toutes les larmes de mon corps d'un mélange de tristesse et de bonheur.

Après avoir respiré une bonne fois, je l'ai appelé pour le remercier, mais je crois pas qu'il ait compris un seul de mes mots tellement j'étais émue. Je pense qu'en me lisant ce soir, il saura pourquoi mes larmes étaient si lourdes.

J'espère qu'il ne m'en voudra pas de vous faire partager son écriture.

Après le déjeuner, une course effrénée s'est organisée pour enchainer la balnéo puis la muscu.
Audrey remplace Aïda dans la piscine. Tout récemment diplômée de l'école de kiné, je pensais qu'elle serait hésitante.
Grande surprise que de voir qu'elle avait étudié mon cas, et qu'elle savait exactement quoi faire. Nous avons ensemble peaufiné la séance de torture du matin.

En cours de musculation, j'étais ravie de constater qu'Anne Sophie avait prévu des poids rose fluo d'1kg  pour mes exercices. Zut, j'avais enlevé ma montre assortie pour ne pas la tremper dans le chlore une heure plus tôt. Tant pis, j'aurai au moins le tee-shirt et mon iphone. C'est pas parfait, mais c'est déjà ça. (J'ai vraiment de gros problèmes existentielles ici!).

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